• J’ai une question :

    Qu’est-ce que la réincarnation ? Qui va se réincarner, et pourquoi ?


    Réponse :

    Imaginez que vous êtes un volontaire dans une organisation humanitaire. Votre chef vous envoie pour une mission de cinq ans dans un village défavorisé. Votre mission : apporter espoir et sens dans la vie du plus grand nombre de personnes possible. Avant de partir, on vous donne une liste d’objectifs à atteindre, des provisions et un budget qui vous permettra de remplir votre tâche. Votre famille et vos amis vous manqueront, mais votre sens des responsabilités vous pousse à relever le défi.

    Dès que vous arrivez dans ce village, votre travail commence. Chaque jour a ses tâches spécifiques et vous organisez soigneusement votre emploi du temps, conscient de l’ampleur de votre mission et du peu de temps dont vous disposez.

    Les cinq années s’écoulent rapidement. C’est dur pour vous de repartir ; vous vous êtes attachés à tous ces gens dont vous vous êtes occupé, vous avez pris goût à la réussite, et vous ressentez bien qu’il y a encore tellement à faire. Mais le moment du départ est arrivé. Votre famille vous attend. Il faut rentrer.

    A votre retour, avant même de retrouver les vôtres, vous vous rendez devant votre chef pour faire un rapport détaillé de votre voyage. Il a suivi vos progrès de loin et souhaite revoir tout cela avec vous. Il sourit quand vous évoquez vos petites victoires – l’espoir apporté aux familles isolées, la nouvelle vie donnée aux âmes perdues. Il pleure avec vous sur vos échecs. Parfois, vous vous êtes levé trop tard le matin et avez raté l’occasion d’aider un enfant affamé. Vous avez dépensé une partie de votre argent pour des choses superflues. De manière générale, votre mission fut un succès, la plupart de votre temps et de vos moyens ont été bien employés. Mais il reste du travail non fait.

    Votre chef vous dit alors :

    « Je sais que cela n’a pas été facile. Vous avez fait un travail formidable, et je suis fier de vous. Mais il y a des choses inachevées. Rendez l’argent et les provisions qui vous restent. Nous avons d’autres volontaires qui attendent de vous remplacer. Vous pouvez rentrer chez vous et retrouver votre famille. »

    Vous êtes ravi. Les retrouvailles avec ceux qui vous sont chers sont encore plus intenses que vous ne l’aviez imaginé. Cependant, après avoir retrouvé votre foyer, quelque chose vous dérange. Vous vous rendez compte qu’une partie de vous est restée en arrière, là-bas. Vous ressentez que votre mission n’est pas terminée. Des choses ont été laissées en suspens, et cela vous empêche de retourner pleinement à votre ancienne vie.

    Jusqu’à ce qu’un jour votre chef vous appelle. Il vous dit que le travail a été fait. En partant de ce que vous aviez réalisé et en continuant ce que vous aviez entamé, d’autres volontaires ont réussi à mener la mission à son terme et amener ces gens là où ils devaient parvenir.

    Maintenant vous pouvez goûter un vrai repos. Votre mission est accomplie.

     


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  • « Heureux l'homme qui fait cela,
    Et le fils de l'homme qui y demeure ferme,
    Gardant le Chabbat pour ne point le profaner,
    Et veillant sur sa main pour ne point commettre aucun mal ! »            (Isaïe 56, 2).

    ***

    « Tous ceux qui garderont le Chabbat,
    Pour ne point le profaner.
    Et qui persévéreront dans Mon alliance,
    Je les amènerai sur Ma montagne sainte... »                                            (Isaïe 56, 6-7)

    ***

    « Si tu retiens ton pied pendant le Chabbat,
    Pour ne pas faire ta volonté en Mon saint jour,
    Si tu fais du Chabbat tes délices,
    Pour sanctifier l'É-ternel en le glorifiant,
    Et si tu l'honores en ne suivant point tes voies ordinaires,
    En ne te livrant pas à tes penchants et à de vains discours,
    Alors tu mettras ton plaisir en l'É-ternel... ».                                                 (Isaïe, 58 :13).

    ***

    « Ainsi parle l'É-ternel : Prenez garde à vos âmes ;
    Ne portez point de fardeau le jour du Chabbat,
    Et n'en introduisez point par les portes de Jérusalem.
    Ne sortez de vos maisons aucun fardeau le jour du Chabbat,
    Et ne faites aucun ouvrage ;
    Mais sanctifiez le jour du Chabbat,
    Comme je l'ai ordonné à vos pères »                                                           (Jérémie, 17 ; 21-22).

    ***

    « Si vous m'écoutez, dit l'É-ternel
    Si vous n'introduisez point de fardeau
    Par les portes de cette ville le jour du Chabbat,
    Si vous sanctifiez le jour du Chabbat,
    Et ne faites aucun ouvrage ce jour-là ;
    Alors entreront par les portes de cette ville
    Les rois et les princes assis sur le trône de David,
    Montés sur des chars et des chevaux,
    Eux et leurs princes, les hommes de Juda
    Et les habitants de Jérusalem,
    Et cette ville sera habitée à toujours »                                                            (Jérémie 17, 24-25).

    ***

    « Suivez Mes préceptes, observez Mes ordonnances, et mettez-les en pratique.
    Sanctifiez Mes Chabbats, et qu'ils soient entre Moi et vous un signe auquel on connaisse que Je suis l'É-ternel, votre D.ieu "                                                                                                                     (Ézéchiel, 20 : 19-20).

    ***

    « Que signifie cette mauvaise action que vous faites, en profanant le jour du Chabbat ?
    N'est-ce pas ainsi qu'ont agi vos pères, et n'est-ce pas à cause de cela que notre D.ieu a fait venir tous ces malheurs sur nous et sur cette ville ?
    Et vous, vous attirez de nouveau Sa colère contre Israël, en profanant le Chabbat !
    Puis j'ordonnai qu'on fermât les portes de Jérusalem avant le Chabbat, dès qu'elles seraient dans l'ombre, et qu'on ne les ouvrît qu'après le Chabbat.
    Et je plaçai quelques-uns de mes serviteurs aux portes, pour empêcher l'entrée des fardeaux le jour du Chabbat. »

    (Néhémie 13, 17-19)


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  • Question :

    Mais qu’est-ce que les Juifs religieux ont contre la télévision ? N’êtes-vous pas un peu coupés de la réalité ? Comment savez-vous ce qui se passe dans le monde sans une télévision chez vous ?

    Réponse :

    Je dirai que c’est plutôt l’inverse : c'est la télévision qui vous déconnecte de la réalité. Quoi que vous regardiez, que ce soit les nouvelles ou des divertissements, vous ratez ce qui se passe dans le monde réel. Les nouvelles sont une distorsion de ce qui se passe dans la vie d’autres personnes, et les divertissements sont une distraction de ce qui se passe dans votre vie à vous. L’expression « télé réalité » est un oxymoron.

    Les journaux télévisés ne font que rapporter des faits, n’est-ce pas ? Faux. Ils ne font que rapporter les faits qui sont captivants visuellement, qui maintiendront l’audimat, conforteront les spectateurs dans leurs préjugés (sans parler des directeurs de chaînes) et qui se caleront en petites séquences bien nettes – comme s’il n’avait jamais existé une histoire trop compliquée pour être rapportée en trois minutes...

    Mais ce ne sont pas seulement les nouvelles qui nous éloignent de la réalité. De même que les journaux télévisés remplacent les faits par des opinions préfabriquées, les émissions de divertissement remplacent la véritable interaction entre êtres humains par les fantasmes de quelqu’un d’autre. Ceux qui passent des heures à suivre des feuilletons sont en train de laisser s’envoler les journées de la vie de leurs propres famille et amis. Les drogués des sitcoms ont oublié l’hilarité de la vie quotidienne. Et les fans scotchés à la « télé réalité » sont aveugles à la réalité qui se déroule sous leur propre toit.

    Se pourrait-il que la télévision soit une des causes principales de la crise relationnelle que nous connaissons aujourd’hui ? Mis à part le temps perdu à faire face à la boîte, il y a un effet plus profond que les médias exercent sur notre génération d’accrocs de la télé. Ainsi, de nombreuses personnes se plaignent qu’elles ne trouvent personne à aimer. Combien de fois entendons-nous « Je ne trouve pas la bonne personne... » ? Et bien, pour un ou une téléphage – ou un couch potato comme on le dit si délicatement en anglais – il n’est pas étonnant que personne ne puisse être « la bonne personne ». Qui peut se mesurer aux personnages magnifiques, drôles, intéressants et piquants qui se pavanent à l’écran et remplissent leurs esprits chaque soir ? Combien de personnes réelles connaissez-vous qui correspondent à ce que la télévision considère comme séduisant ? Bien sûr, personne dans le monde réel n’est à la hauteur.

    Personnellement, je me sens plus connecté avec le monde réel sans télévision. Vous n’êtes peut-être pas prêt à jeter la vôtre par la fenêtre. Mais au moins, assurez-vous que c’est vous qui contrôlez la télévision et pas l’inverse. Faites attention à ne pas perdre sur le terrain des relations réelles en favorisant des amis imaginaires. La vie n’a pas été conçue pour être vécue seulement pendant les pauses publicitaires.

    ce cours et pour la hatslaha' de :

    בניה שלום יעשקב בן רחמיה
    אביטל רבקה בת רחמיה
    יהוידע רחמים בן רחמיה
    ציפיה מיכל בת רחמיה
    ידידיה אליהו בן מרדכי

     


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  • La foi en la venue du Machia'h – le Messie – est un élément central de la religion juive, l'un des « treize principes de la foi » énoncés par Maïmonide selon lequel chaque Juif se doit de croire en lui et d'attendre sa venue. Parmi les dix-huit bénédictions que compte la prière tri-quotidienne de la Amida, pas moins de six expriment la demande à D-ieu que la Délivrance intervienne au plus tôt.

    Pourquoi ce sujet, qui semble a priori secondaire en regard de l'importance de croire en D-ieu et d'accomplir Ses commandements, revêt-il un caractère si fondamental ?

    De prime abord, il semble que la venue du Messie soit un fait qui ne concerne que l'avenir. La Torah écrite contient de nombreuses prophéties qui traitent de « la fin des temps » en lesquelles, en tant que Juifs croyants, nous avons évidemment foi. Cependant, concernant le Machia'h, la Torah nous enseigne que la simple « foi » n'est pas suffisante. Au-delà de la croyance, il nous est requis au quotidien une attente « active » et impatiente, une prière continuelle, une expectative empreinte d'un espoir vers lequel s'oriente toute notre vie. Ceci nécessite d'être bien compris car, en effet, pourquoi un « bon Juif » ne pourrait-il pas étudier la Torah et servir convenablement son Créateur sans qu'on exige de lui d'attendre la venue du Machia'h avec une telle intensité ?

    La question est d'autant plus forte si l'on considère qu'à notre époque il nous est possible de vivre un judaïsme riche et entier. Le temps des pogroms, des autodafés et des conversions forcées est en effet révolu. Le temps où les Juifs étaient exclus de la plupart des métiers et vivaient dans la misère l'est également. Aujourd'hui, au contraire, les institutions vouées à l'étude de la Torah et du Judaïsme ne cessent de prospérer. Il peut, dès lors, sembler paradoxal de réclamer à cor et à cri un Messie qui vienne arranger nos problèmes. Que manque-t-il donc de nos jours à un Juif qui souhaite servir D-ieu de tout son cœur, pour qu'il souhaite la venue du Machia'h avec tellement d'ardeur ?

    La plénitude

    La réponse à ces questions est contenue en substance dans le corpus législatif de Maïmonide, au onzième chapitre des « Lois des Rois » : « Le Roi Machia'h se lèvera un jour pour restaurer la royauté de David telle qu'elle était jadis. Il reconstruira le Sanctuaire et rassemblera les exilés d'Israël et toutes les lois seront rétablies comme auparavant. » Fait remarquable, dans cette définition « halakhique » du Machia'h, Maïmonide ne parle nullement des changements miraculeux dans le monde que les Ecritures annoncent pour l'ère messianique. Il ne traite que de la plénitude de la Torah et du Judaïsme qui reviendra par l'action du Machia'h.

    En effet, l'attente du Machia'h exprime en premier lieu le souhait d'un Juif de parvenir à la perfection dans l'accomplissement de la Torah et des Mitsvot. Nous savons qu'il est aujourd'hui impossible d'accomplir toutes les lois de la Torah. Pas seulement à cause de nos ennemis ou du mal présent dans le monde mais aussi parce que des parties entières de la Torah sont hors de notre portée. Parmi les 613 Commandements que celle-ci nous ordonne, nous ne pouvons actuellement en accomplir que 207. Toutes les Mitsvot concernant le Roi, le Sanhédrine (le grand tribunal rabbinique), le Temple et son service, l'année chabbatique et celle du jubilé, etc.. nous sont aujourd'hui inaccessibles. Il ne s'agit pas là que d'un problème quantitatif. La vie juive dans son ensemble s'organise actuellement autour de l'individu et non de l'ensemble en tant que peuple, à l'opposé de la structure prévue par la Torah. La Torah est ainsi aujourd'hui majoritairement théorique et non pratique.

    En son for intérieur, un Juif ne peut se résoudre à une situation dans laquelle la Torah ne peut être vécue intégralement. Il croit en la Torah et en son caractère éternel et refuse qu'une partie si importante et essentielle soit mise de côté. Il est persuadé qu'en définitive cette situation ne peut être que temporaire et que très bientôt les conditions qui permettent son plein accomplissement seront rétablies. C'est là la teneur de la foi en la venue du Machia'h : la foi en l'avènement d'une ère de plénitude dans l'accomplissement de la Torah et des Mitsvot.

    Le Machia'h ne se contentera pas de restaurer la situation qui prévalait avant l'exil mais amènera une plénitude jamais connue auparavant. L'une des preuves sur lesquelles s'appuie Maïmonide pour démontrer que le sujet du Machia'h est mentionné dans le Pentateuque est l'un des verset qui concerne les « villes de refuge ». La Torah nous ordonne en effet : « Lorsque D-ieu élargira ta frontière, tu ajouteras trois autres villes » (Deutéronome 19, 8). Or, cet évènement ne s'est pas encore accompli. C'est donc le Machia'h, au temps duquel s'accomplira la promesse « Lorsque D-ieu élargira ta frontière », qui dirigera la manière dont le Peuple Juif « ajoutera trois autres villes ».

    Etre disponibles

    Tous les prodiges que le Machia'h accomplira auront pour but d'atteindre cette plénitude dans le Judaïsme : Plus aucun ennemi n'aura la capacité de gêner le Peuple Juif dans son service divin ; l'abondance des bienfaits permettra à chacun d'être disponible pour s'adonner à l'étude de la Torah ; le dévoilement des secrets de la Torah par le Machia'h permettra de s'attacher toujours plus profondément à D-ieu.

    La centralité de la croyance en la venue du Machia'h est, dès lors, tout à fait compréhensible. Un Juif qui a foi en la Torah et les Mitsvot et qui sait que leur accomplissement ne peut se faire pleinement à l'heure actuelle a donc nécessairement foi en l'avènement d'un jour où ceci sera rectifié. Et lorsque la Torah et les Mitsvot sont pour quelqu’un sa raison de vivre, cette foi se traduit par une attente impatiente et un espoir constant.


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  • Par la grâce de D.ieu,

    Le 25 Iyar 5719


    Salut et bénédiction,

    J’ai bien reçu votre lettre. Elle contient une question posée par des jeunes gens et des jeunes filles, et je vous prie de m’excuser auprès d’eux d’avoir tardé à leur répondre,

    À l’évidence, il est impossible, dans le cadre d’une lettre, de répondre à cette question de manière exhaustive. Aussi m’attacherai-je à quelques points essentiels. Vous pourrez cependant, je l’espère, enrichir mes explications de vos propres commentaires qui trouveront leurs bases dans l’enseignement de la Torah en général et plus particulièrement dans celui de la pensée hassidique. Il va également de soi que je reste prêt à répondre à de nouvelles questions ou à des objections.

    Il m’est demandé : « Pouvons-nous avoir la preuve, nous qui doutons, de l’existence de D.ieu, clairement et sans réserve ni possibilité de réserve ».

    Certaines questions, parce qu’elles paraissent simples, sont formulées au moyen d’expressions banales et familières.

    Pourtant, ce sont ces questions-là qui exigent une attention particulière et, plus que d’autres, imposent une précision du discours. Cette affirmation est d’autant plus forte ici qu’une question posée d’innombrables fois, en d’innombrables temps, ne peut avoir eu pour tous ceux qui l’ont posée le même contenu. Il faut donc, en premier lieu, circonscrire le sens des expressions auxquelles on aura recours. Ainsi les notions « d’existence » et de « preuve d’une existence » peuvent être indifféremment utilisées par un enfant ou un chercheur.

    Pour le premier, cependant, ces notions se bornent aux choses concrètes, palpables, alors que le chercheur examinera avec minutie les moindres détails. L’aveugle, quant à lui, ne pourrait donner aucun sens intrinsèque à la notion d’existence des couleurs, insaisissable pour lui hors du témoignage de ceux qui voient.

    À un niveau plus élevé : chacun admet sans réserve que la manifestation d’un phénomène quelconque suppose l’existence d’une cause à ce phénomène. Autrement dit, que la perception d’un phénomène prouve l’existence d’une énergie, bien que cette preuve ne soit pas directe et que subsiste donc, a priori, une possibilité de doute.

    De ce que nous disons, l’énergie électrique est un exemple.

    L’homme est doté de sens. La vue, chez lui, vérifie l’existence des couleurs, l’ouïe celle des sons. Ces perceptions sont considérées comme des preuves absolues et directes. Or, aucun des sens de l’homme ne peut percevoir, en elle-même, l’énergie électrique. Seuls ses effets lui apparaissent : un fil de métal deviendra incandescent, l’aiguille d’un ampèremètre s’agitera. Cela est pourtant considéré comme une preuve irréfutable de l’existence d’un courant électrique. Il en est de même pour une énergie magnétique ou une autre énergie, mais si j’ai pris l’exemple de l’électricité c’est parce que son existence est répandue et admise sans aucune réserve ni l’ombre d’un doute

    Allons plus loin : il est tout à fait admis, aujourd’hui, que tout effet a une cause, quand bien même celle-ci contredirait la logique humaine.

    Un exemple : l’existence d’un champ de pesanteur dont l’effet est le mouvement d’objets. Le fait de n’apercevoir aucune cause physique du déplacement de certains objets a conduit à admettre l’existence d’un champ, bien que l’idée d’une force qui agisse à distance, sans aucun intermédiaire, soit, a priori, un défi à l’esprit humain.

    Pourtant, l’existence de ce champ, enseignée dès le plus jeune âge, répétée par les livres de classe, est devenue une sorte d’évidence, au-delà de tout doute ou de toute remise en cause. Or, la tentative de modéliser le champ de pesanteur par une matière « fine » appelée « éther » conduisit à des propriétés tellement contradictoires que l’existence de cette matière s’est avérée encore moins plausible que la possibilité d’une action à distance sans aucun intermédiaire.

    J’ignore quel domaine des sciences est familier aux jeunes gens et aux jeunes filles qui m’ont posé cette question et, plus particulièrement, s’ils étudient les sciences dites exactes. C’est précisément dans ce domaine qu’a été formulée, il n’y a pas si longtemps, une théorie qui a été reçue comme une révélation géniale par la communauté scientifique : la matière n’est qu’une forme particulière d’énergie et l’on peut transformer l’énergie en matière ou la matière en énergie. Cette théorie dépasse tout intellect humain, mais certaines expériences ne trouvent aucune explication si on ne l’admet pas. Et cette seule raison tient lieu de preuve scientifique, admise partout comme irréfutable, sans réserve ni possibilité de réserve (pour reprendre les termes mêmes de la lettre qui m’a été adressée) bien que, pour notre entendement, on soit ici en pleine absurdité.

    Comme, dans la formulation de leur question, nos étudiants n’ont donné aucune précision sur ce qu’ils accepteront comme preuve de l’existence de D.ieu « clairement et sans réserve », je suppose qu’ils admettront un mode de preuve qu’ils utilisent dans leur vie quotidienne.

    Cela étant admis, il est clair qu’il y a une preuve (et même plusieurs) de cette sorte quant à l’existence de D.ieu. Et, comme il vient d’être dit à propos de théories scientifiques, ces preuves ne sont pas contredites par le fait que la vérité profonde de cette existence n’est pas saisissable par l’entendement humain ou même qu’elle s’oppose à cet entendement. Car, comme on l’a montré, il est admis par ceux qui réfléchissent au monde physique dans lequel nous vivons pour en modéliser les phénomènes, que la compréhension de la substance de ces phénomènes n’est pas décisive dans la validité de leur modélisation.

    Le processus de démonstration ou la démonstration elle­-même de l’existence de D.ieu que nous allons donner est donc de la même nature que celles utilisées par les sciences exactes, Plus encore, elle se fonde sur des preuves qui appartiennent au mode que chacun de nous utilise, dans sa vie quotidienne, pour étayer ses décisions.

    Qui réfléchit à la manière dont il agit, chez lui, dans la rue, à son coucher ou à son lever, admettra sans difficulté qu’il n’exige pas de lui-même de vérifier le bien-fondé de chacune de ses actions, de chacun de ses comportements, mais qu’il accepte le témoignage de ceux qui, avant lui, ont eu à réagir à des situations de même nature. Ce n’est que lorsqu’un doute apparaît sur la probité du témoignage, soit que le témoin soit orienté par des contraintes intérieures ou extérieures, soit qu’il n’ait pas été parfaitement lucide et semble avoir eu une vision déformée des faits, ou pour toute autre raison, qu’il est fait appel à d’autres témoignages.

    Alors, plus les témoins seront nombreux, plus ils seront différents socialement ou culturellement, plus seront différents les cercles auxquels ils se rattachent, et plus sera réduite la possibilité de falsification, plus la preuve apparaîtra comme scientifique et irréfutable.

    C’est ici, précisément, qu’il nous faut revenir à notre sujet. Le récit du Don de la Torah sur le Mont Sinaï a été transmis, sans la moindre faille, de génération en génération, comme un fait survenu en présence de six cent mille hommes adultes, sans compter les femmes, les enfants ni les vieillards, soit, au total, plusieurs millions d’individus sortis d’Égypte qui ont vu, de leurs propres yeux, cet événement.

    Il n’est pas question ici du témoignage limité d’un seul prophète ou d’un groupe restreint, d’une vision apparue au milieu d’un rêve. Il s’agit ici d’un témoignage transmis de père en fils, de génération en génération, et tout le monde admet que jamais il n’y eut la moindre interruption et que le nombre de témoins n’a pas été inférieur à six cent mille personnes, au demeurant fort différentes les unes des autres. Et même après la dispersion de ces témoins aux quatre coins du monde, les versions qui nous sont parvenues de cet événement historique concordent en tous points. Est-il témoignage plus sûr et plus précis que celui-là ?

    Une autre preuve, fonctionnant sur le même mode que celui relevé à propos des sciences exactes, peut être avancée. Si l’on voit un objet comprenant un certain nombre de pièces, s’adaptant les unes aux autres avec une précision extrême, alors, même si ces pièces n’ont a priori aucun rapport entre elles, on peut déduire avec certitude qu’une énergie, qui leur est extérieure, lie et unit toutes ces pièces.

    Et le fait même que cette énergie lie et unit ces pièces prouve qu’elle leur est supérieure et qu’elle les domine.

    Si, par exemple, on entre dans une usine entièrement automatisée et qu’on n’y voit aucun homme, on n’imaginera pas, et cela sans aucune réserve, que cette usine puisse fonctionner sans un mécanicien qui ait pensé l’organisation des machines et des pièces qui la composent, dont l’esprit relie et unit ces machines entre elles et par rapport à l’ordre central. Au contraire même, plus les interventions visibles de l’homme seront rares, plus l’automatisation sera poussée, plus grand apparaîtra le génie du mécanicien.

    S’il en est ainsi pour une usine, composée de centaines, de milliers, ou de dizaines de milliers de pièces, a fortiori, lorsque l’on réfléchit, dans notre monde, à la constitution d’un morceau de bois ou de pierre, d’un végétal ou d’un animal, ou à plus forte raison, d’un être humain, on arrive, comme le dit le verset, à « voir la Divinité à travers sa chair ».

    Et ceci plus particulièrement encore depuis que, grâce au progrès scientifique de ces dernières décennies, nous savons que chaque chose est composée de dizaines de milliards d’atomes dont chacun d’entre eux contient un certain nombre de particules. Pour le sens commun, le désordre, le chaos le plus total aurait dû régner entre ces particules !

    Or, nous constatons qu’il existe un ordre extraordinaire, une concordance étonnante entre les parties les plus petites et les plus grandes de ce monde, une correspondance entre les parties du microcosme et celles du macrocosme : il est donc clair, sans l’ombre d’un doute qu’un « mécanicien » préside à cet ordre.

    Naturellement, je n’ignore pas la formule consacrée attribuant un tel ordre aux « lois de la nature », mais je pense qu’il est superflu d’insister sur le fait que cette expression ne contient en elle aucune explication et qu’elle n’est que la description commode d’une situation existante, à savoir que les objets naturels se comportent selon un ordre établi. Mais penser qu’une « loi de la nature » est une existence indépendante, que chaque créature est dirigée par une loi et qu’il y a autant d’êtres particuliers que de lois est une absurdité totale qu’aucun scientifique, dans le domaine qui est le sien, n’oserait soutenir. Encore une fois, il n’y a là qu’une expression commode qui permet l’économie d’explications sur les situations les plus simples (ou définies comme telles), mais il est évident qu’elle n’explique rien.

    Et surtout, je suppose que nos étudiants souhaitent une preuve sur laquelle ils fonderont leur comportement quotidien. Or, la preuve qui a été donnée est infiniment plus forte que toutes les preuves sur lesquelles est aujourd’hui fondé leur comportement de chaque jour.

     Qu’y a-t-il de plus courant que de tout préparer pour le lendemain avant d’aller dormir ? Pourtant, aucun raisonnement logique ne nous assure qu’au matin le soleil se lèvera encore une fois et que toute la nature se manifestera comme la veille. Mais, comme l’univers se comporte ainsi depuis des jours et des années, « il est sûr » que ces « lois » qui le dirigent aujourd’hui le dirigeront encore demain et après-demain. Et par cette seule supposition, on justifie l’effort de la préparation du lendemain, alors même que cela n’a aucun fondement « logique » autre que celui de l’existence d’un Maître à ce mécanisme universel.

    Comme il a été dit plus haut, on pourrait longuement développer cette analyse, en expliciter certains points. Mais j’espère que ce qui a déjà été dit sera suffisant et vous fournira la matière d’une réflexion d’où vous pourrez conclure que ceux qui prétendent que la recherche de preuves de l’existence de D.ieu est nécessaire se trompent, car l’existence de la création en est elle-même une preuve. C’est une preuve irréfutable au moment où les dernières théories scientifiques sur la création et une certaine façon de la décrire font naître les plus grandes difficultés.

    En effet, entre différentes conclusions intervenues dans plusieurs domaines scientifiques, des contradictions sont apparues. Cela, sans compter le doute fondamental qui accompagne la pratique scientifique ces derniers temps : ce que perçoivent nos sens et notre cerveau est-il lié en quelque manière avec ce qui existe hors d’eux, à l’extérieur ?

    Il n’en va pas de même pour le Créateur ou, en d’autres termes, pour l’Artisan qui a créé l’univers et qui l’a mis en ordre. Qu’il y ait une existence extérieure au sujet ou seulement l’impression de cette existence est alors indifférent : pour tout homme, tout objet existant dans Son monde a une cause qui agit sur lui, que ce soit de l’intérieur ou de l’extérieur.

    Je voudrais ajouter une dernière remarque : les preuves simples, à cause même de leur simplicité, sont souvent difficilement admises. Mais j’espère qu’il n’en sera pas ainsi pour ceux qui m’ont posé la question. En effet, cette attitude devant de telles preuves n’a aucun fondement logique ni aucune répercussion pratique, comme on peut aisément s’en rendre compte. Or, l’un des fondements de la croyance dans le Créateur et Maître du monde et en l’événement du Mont Sinaï, don de la Torah et de ses commandements, est que le principal est l’action.

    J’aurai plaisir à connaître les réactions à tout ce qui précède et j’espère qu’elles s’exprimeront sans gêne, même si elles doivent apporter certaines contradictions...

    Avec ma bénédiction,

    Mena'hem Schneersohn


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